- judge me by the enemies i have made -
ariadne leister x lula goldstein

Le parc tout près du Royal Pavillon était, au fil des années, devenu un de ses endroits où Lula aimait venir se promener ou s'asseoir, profiter un instant de la nature, prendre l'air frais. C'était reposant, pour elle, et ses écouteurs sur les oreilles, elle avançait sans trop regarder où elle allait. Pourtant, son regard ne tarda pas à être attiré par une jeune femme qui arrivait vers elle. — Oh non, pas elle.— qu'elle marmonna. Lula ne mit pas longtemps à la reconnaitre, et la gamine s'arrêta net, la regardant un instant. Elle se demandait ce qu'elle devait faire, partir en courant ou l'affronter. La dernière fois qu'elle l'avait vu, c'était quelques jours plus tôt, dans un bar de la ville, en compagnie de Nash. Ça la rendait dingue de se retrouver face à elle. Avant qu'elle n'est le temps de choisir ce qu'elle allait faire, elle remarqua le regard de la jeune femme se poser sur elle. Trop tard, impossible de fuir après ça. Elle resta planter là, espérant que la femme décide de passer le chemin plutôt que de la confronter. Parce que même si elle aurait été incapable de se l'avouer, elle regrettait son comportement, ce soir-là. Sa crise de jalousie, la façon dont elle avait décidé de fuir le lieu au lieu d'affronter cette femme. Elle aurait préféré oublier ça, mais c'était impossible. Elle doutait que la fameuse meilleure amie l'est oublié, elle aussi.

Ariadne avait besoin de prendre l’air, de se changer les idées. Elle n’était revenue à Brighton que depuis quelques jours et pourtant, elle avait déjà hâte de partir à nouveau. Elle était revenue afin de revoir son meilleur ami, Nash. Mais tout ne s’était pas déroulé comme elle l’aurait souhaité. Ariadne, elle aime tout contrôler, elle aime quand tout fonctionne comme elle le voudrait. Pourtant la soirée à laquelle elle s’était rendue afin de revoir Nash, avait été catastrophique. Elle ne cessait de se repasser en tête les mots qu’il avait dit à cette chanteuse. Il l’aimait. Combien de fois Ariadne avait espéré que ces mots, il le lui dise. Mais elle devait se rendre à l’évidence. Nash ne l’aimait pas. Ou du moins, pas comme ça. Un long soupire s’échappe de sa bouche alors qu’elle marche vers le parc dans le quartier de West Side. Cet endroit, elle le connaît comme sa poche. Elle aurait pu y aller les yeux fermés. Car ce parc, elle venait y jouer avec Rowena quand elles n’étaient encore que des gamines. Mais les choses ont bien changé maintenant. Cependant, cet endroit reste son préféré. La brise légère vient fouetter son doux visage rosi par la fraîcheur de cette journée. Et alors qu’elle arrive au parc, son regard se pose avec malheur sur la dernière personne qu’elle aurait aimé croiser. Dites-moi que je rêve. Pensa-t-elle au plus profond d’elle même. Aria leva les yeux au ciel. Peut-être aurait-il préféré qu’elle ne sorte pas de chez elle, et qu’elle se contente de s’apitoyer sur son sort. Mais la Leister n’était pas comme ça. Son père lui a toujours appris de rester forte, même devant ses ennemis. De toujours garder la tête haute, et de ne pas laisser ses émotions prendre le dessus. Elle vit le regard de cette fille se poser sur elle également. La confrontation lui semblait presque inévitable alors qu’elles continuaient à marcher l’une vers l’autre. Un raclement de gorge se fit entendre, alors qu’Ariadne arrivait à sa hauteur, l’air de rien. — Hey. Lula, c’est ça ? Ariadne lui adressa un léger sourire, sans pour autant que celui-ci ne soit sincère. — Je suis Ariadne. Nash n’a pas eu le temps de faire les présentations la nuit dernière. Elle haussa les épaules, espérant que la gamine comprenne qu’elle faisait allusion à la soirée passée.

La possibilité de faire demi-tour venait de lui passer sous le nez, et très vite, elle entendit son nom prononçait par la jeune femme devant elle. Lui offrant à son tour un sourire, elle doutait fort que la demoiselle soit là pour faire la conversation, ou se présenter en bon et du forme. C’est pourtant ce qu’elle fit, rappelant à Lula a fin de soirée légèrement chaotique qu’ils avaient vécu, tous les trois. Ariadne. C’était son nom, visiblement, et Lula se contenta d’hocher la tête pour lui répondre. — Oui, Lula, c’est ça. — Visiblement, elle l’avait retenu. Nash lui avait sûrement parlé d’elle, avant qu’elle ne s’échappe après son concert. La regardant longuement, Lula cherchait tant bien que mal quoi dire. Elle n’était pas du genre à mentir, Lula. Elle n’allait pas lui dire qu’elle était enchanté, elle n’allait pas non plus lui demander si elle avait apprécié la soirée. Elle s’en fichait bien, au final. Se demandant un instant ce qu’elle allait dire, elle reprit finalement la parole. — Écoute, je sais que Nash et toi êtes proches, et ça m’est égal. Il a le droit d’avoir des amis. On va juste pas se faire de soirées tous les trois, parce que moi, ça me va pas. — Si ça ne lui allait pas, c’était simplement car elle voyait bien la façon dont Ariadne regardait Nash. Si l’homme était capable de croire qu’elle n’était qu’une amie, Lula elle, voyait bien que c’était plus, du moins du côté de la jeune femme. Un amour non partagé, une fille qui était resté bloquée à la case amitié. Du moins, c’est ce que Lula pensait savoir, loin d’avoir encore tous les points concernant cette relation bien plus complexe qu’elle semblait le penser. Si Nash et Ariadne continuaient à se voir, elle n’en dirait rien. Ce n’était pas à elle à choisir les fréquentations de son petit-ami, elle était loin d’être ce genre de fille là. Mais le moins elle verrait Ariadne, le mieux elle se porterait, elle n’en doutait pas.

Soit proche de tes amis, mais encore plus de tes ennemis. C’était ce que son père n’avant cessé de lui répéter à de nombreuses reprises. Et c’était d’ailleurs ce qui l’avait rendue plus forte, Ariadne. Elle ne serait pas la femme qu’elle est en ce moment sans son père. Elle ne le remercierait jamais assez pour tout ce qu’il lui a appris. C’est donc la tête haute, fière, qu’elle se tenait devant cette Lula. Bien plus petite qu’elle, Ariadne en imposant. Elle le savait, et elle en était fière. Au plus elle la voyait, au plus elle se demandait ce que Nash pouvait lui trouver. Mais d’un autre côté, Nash était ce genre d’homme campagnard, alors ce choix, au fond, ne l’étonnait même pas. Faisant mine de frissonner à cause du vent, elle croisa ses bras sous sa poitrine. Certes, Ariadne aurait pu l’éviter, faire comme si de rien n’était. Mais elle n’était pas comme ça. Elle avait décidé de l’affronter. — Proches ? Elle ricana ironiquement, Aria. — Visiblement Nash ne t’a pas tout dit. Je ne suis pas qu’une amie pour Nash, sache-le. Même si il a pu te dire le contraire. Ariadne remit ses cheveux en place en secouant légèrement la tête. Elle réajusta son long manteau. Au fond, peut-être avait-elle bien fait d’aller à sa rencontre, même si elle avait vu Lula a fuir du regard. Pauvre petit enfant apeuré. Ca l’a faisait rire intérieurement Ariadne. — Et t’en fais pas, les plans à trois ça ne m’intéresse pas. Elle haussa les épaules. Elle allait sans doute choquer cette demoiselle assez prude, mais elle s’en fichait bien. Et c’était par cette dernière phrase qu’elle espérait bien faire comprendre que non, elle et Nash ne sont pas de simples amis.

Elle n'était pas faible d'ordinaire, la petite blonde. Au contraire, ses parents lui avaient dit plus d'une fois qu'elle avait un caractère un peu trop fort, une vraie tête de mule. Elle savait ce qu'elle voulait, elle n'hésitait pas à le faire savoir. Et pourtant, il y avait ces quelques situations où elle perdait simplement toute sa capacité à agir ou parler comme une adulte censée. Elle redevenait une fillette apeurée, quasiment incapable de quoi que ce soit, qui préfèrerait se cacher pour pleurer dans son coin. Ariadne était l'une de ces situations. Deux fois elle l'avait vu, deux fois elle avait eu la même réaction. L'envie de fuir le plus loin possible d'elle avant que son venin ne l'atteigne. Elle n'était pas spécialement impressionnée, la musicienne, mais ne l'empêchait pas d'être incapable d'agir convenablement. Elle tenta de faire comprendre son point de vue à Ariadne, qui ne semblait pourtant pas l'entendre de la même façon. Son petit rire parfaitement ironique fit légèrement grimacer Lula. Cette femme avait tout de la vilaine dans les films qu'elle regardait, voir même de la sorcière déguisée en belle jeune femme dans les dessins animés de son enfance. Lula n'en doutait plus, elle devait être pourrie jusqu'à l'os, intérieurement. Une véritable pomme qui devait empoisonner tous les hommes qui osaient vouloir leur part, un mauvais cadeau au pied du sapin le matin de Noël. La réponse d'Ariadne eut quand même son effet sur la plus petite des deux, qui fronça les sourcils. — Mais de quoi tu parles ? — Il avait été clair, Nash. C'était sa meilleure amie. Rien n'avait laissé supposé le contraire, si ce n'était Ariadne et ses petits commentaires. Secouant la tête, elle leva rapidement les yeux au ciel. — C'est pas non plus la peine de t'inventer une vie, tu sais. Je vois pas ce que ça nous apporte dans cette conversation. — tenta-t-elle de conclure le plus gentiment possible, déjà agacée par ce qu'Ariadne tentait visiblement de lui faire croire.

Ariadne ne put s’empêcher de sourire quand elle entendit les réponses de Lula. Un sourire narquois, espiègle. Cette situation la faisait rire. Cette Lula était tellement innocente. Ce n’était qu’une enfant, une gamine, qui avait l’air de tomber amoureuse pour la première fois. Elle pouvait comprendre pourquoi elle avait jeté son dévolu sur Nash. Il était beau garçon, il avait ce sourire qui en faisait craquer plus d’une. Ariadne aussi avait craqué pour lui, et elle ne le cachait pas. — Oh, visiblement il ne t’a rien dit. Elle afficha un air presque embêter. Après tout, qui disait à sa copine que sa meilleure amie avait été plusieurs fois un plan cul. Personne. Un soupir s’échappa de sa bouche. Mais il fut vite remplacé par un sourire à la phrase de Lula. Visiblement, elle avait de la répartie la petite. Ça l’a fit rire intérieurement, Ariadne. Elle aurait presque eu envie de l’applaudir. — Écoute, Lula. Elle appuya bien sur son prénom tout en prononçant cette phrase. — Tu ne me connais pas, je ne te connais pas. Et je ne chercherais pas à le faire, même pour les beaux yeux de Nash. Mais sache que je n’ai pas besoin de m’inventer une vie. Toi, tu n’es personne. Elle s’approcha un peu plus de la Goldstein, devenant presque imposante. — S’il n’assume pas ce qu’il s’est passé entre nous, et s’il ne veut pas te l’avouer, c’est son problème. Pas le mien. Nash est mon meilleur ami. Il a été plus que ça. Mais je suis passée à autre chose, ne t’en fais pas. Oui, Ariadne aimait se persuader qu’elle avait fini par passer à autre chose. Certes, c’était le cas, mais elle porterait Nash à jamais dans son coeur. En revenant à Brighton et en le voyant avec cette musicienne, elle avait fini par se faire une raison. — Sur ce, j’ai autre chose à faire que de perdre mon temps avec toi et à t’expliquer les faits. Je pense que tu as très bien compris. Ariadne recula, élargissant l'espace entre elles deux, prête à partir.

Le petit sourire narquois qui n’avait pas quitté les lèvres de la jolie Ariadne tapait sur les nerfs de la Goldstein. C’était ce genre de femme, sûre d’elle, un peu trop, même. Même pas besoin de lui parler pour savoir qu’elle se pensait supérieure que la plupart des gens qui l’entouraient. Supérieure à Lula, en tout cas, c’était certain. Elle aurait aimé que ça ne la touche pas, elle l’aurait vraiment préféré ce scénario. Et pourtant, elle était touché. La première rencontre avec la femme n’y était sûrement pas pour rien. Lula avait bien vu la façon dont elle bouffait Nash des yeux, alors qu’ils n’étaient, à ce qu’il lui avait dit, qu’amis. Mais les révélations lui firent rapidement comprendre que ce n’était pas forcément le cas. Elle aurait voulu ne pas la croire. S’il y avait quelqu’un à qui Lula faisait confiance, c’était Nash, et certainement pas cette femme. Pourtant, elle ne semblait pas mentir. Ses mots étaient trop honnêtes, et elle se faisait un malin plaisir à annoncer des vérités que Lula ne connaissaient pas encore. Lula la laissa finir, alors qu’elle réfléchirait à la réaction la plus adéquate. Lui dire qu’elle mentait ? Elle avait bien trop peur des détails qu’Ariadne pourrait lui donner. L’attaquer ? Oh, Lula ne manquait pas d’envie de lui arracher ses cheveux, mais la possibilité de recevoir un coup de ses affreux talons ne semblait pas le meilleur des choix. Tentant de garder la tête haute, elle releva le regard sur la blonde, avant d’énoncer dans la plus grande simplicité. — Il ne trouvait visiblement pas ça assez important pour le mentionner. — Elle haussa les épaules, avant de rajouter, arborant à son tour un léger sourire, bien plus amical que celui qu’Ariadne portait depuis leur rencontre. — Et puis, ça n’empêche pas que c’est sur moi, qu’il avait les yeux rivés, l’autre soir. — Elle la ramenait alors qu’elle avait envie de se tapir dans un coin. Pendant un instant, elle en se sentit en colère après Nash, de lui avoir caché une telle chose. Mais au final, elle réalisa vite que ça ne changeait rien. Si elle était blessé par cette omission de l’histoire, ça ne changeait rien à leur relation, l’amour qu’il partageait maintenant. Lula savait qu’il ne l’avait pas fait pour la blesser. Et pourtant, cela confirmait tous les doutes et toutes les peurs qu’elle avait ressenti la fameuse soirée, alors qu’ils étaient ensemble et qu’elle était sur scène.

Ariadne aurait tellement pu passer à côté de Lula, la saluer simplement, ou même l’ignorer. Mais sans trop savoir pourquoi, elle avait préféré la confrontation. Et elle n’était pas de tout repos. Ariadne était comme ça, son père lui avait appris, point barre. Certes, elle pouvait être un peu trop hautaine et sûre d’elle à certains moments, mais quand il s’agissait de Nash, il ne fallait pas lui casser les burnes. Non, Ariadne n’allait pas se laisser faire. Et elle eut un sourire, quand elle entendit les réponses de la jeune Lula. Elle avait du répondant, la petite, et Ariadne aimait ça. Peut-être qu’au fond, elle pourrait l’apprécier pour ça. Car aux premiers abords, à cette soirée, elle l’avait trouvée tellement .. niaise, nunuche. Et Ariadne n’avait pas compris le choix de Nash. Elle pensait qu’il aimait les femmes plus fortes, ayant plus de caractère. Mais elle ne lui en voulait pas, à son meilleur ami. Au fond, tout ce qu’elle souhaitait, ce n’était que son bonheur. — Je ne vais pas te répondre, car je trouve ta répartie pathétique. Mais ce n’est pas grave, je peux t’apprendre si tu veux. Sourire narquois aux lèvres, elle lui tapota l’épaule. Qu’est-ce qu’elle pouvait être odieuse. Elle le savait parfaitement. — Grand bien te fasse, Lula. Mais je m’en fiche. Tous mes voeux de bonheur. Et je vous souhaite sincèrement d’être heureux. Car Nash le mérite. Et je ne doute pas qu’il puisse l’être avec toi. Serait-ce de la gentillesse ? Peut-être bien. Ariane se recula à nouveau, ne voulant pas s’éterniser avec elle. — Au plaisir de t’avoir revue. Et sur ces mots, Ariadne lui souris, avant de passer à côté d’elle et de continuer son chemin.