Be there in 5.
Tu envoies le texto, même si tu sais et qu’il sait très bien que tu ne seras pas là dans cinq minutes. Pas que tu ne voudrais pas, mais puisque tu es encore au bureau, le téléphone à l’oreille avec une ligne en attente, tu ne crois pas qu’il soit très probable que tu puisses être soudainement libérée dans un délai raisonnable. Ça t’énerve, mais c’est une réalité à laquelle tu dois faire face depuis des années maintenant. Ton métier, il n’arrête jamais. Le téléphone, tu as beau le mettre sur silence, c’est pratiquement impossible de l’ignorer. Et les drames n’arrêtent jamais. Tu écoutes les mots qu’on te répète au bout du fil, tu donnes des conseils un peu machinalement, tu confirmes un rendez-vous avec le client pour le lendemain. Des tâches qui deviennent routinières et habituelles au milieu d’un emploi ou absolument tout le reste est loin d’être pareil. Tous les divorces partent avec les mêmes intentions, mais le chemin pour se rendre au certificat est souvent unique et sinueux pour la plupart des cas. Déjà trois minutes de passer. Tu penses à Miles qui t’attend au café, tu te sens mal, mais te sentir mal n’aidera pas à finir cette putain de journée plus vite. Tu remercies le client qui raccroche enfin, tu passes à la prochaine ligne. Tu entends une voix que tu ne reconnais pas, nasillarde et dérangeante, qui commence à se plaindre du temps d’attente et des tarifs avant même que tu n’aies eu le temps de dire bonjour. Tu retiens un soupir alors que la tête de ton assistante se place dans le cadre de porte de ton bureau. Elle a les mains pleines de documents et tu sais que tu devrais t’y attarder avant de partir, mais tu décides que non. Que pour aujourd’hui, tu as assez donné. Qu’au besoin, tu reviendras plus tard en soirée mais pour l’instant, tu veux une pause. Tu as besoin d’une pause. Tu lui fais signe de tout laisser sur le bureau, et elle t’offre un sourire compatissant alors qu’elle entre et sort de ton bureau en quelques secondes seulement et tu te concentres sur la voix nasillarde d’une nouvelle cliente déjà hautement insatisfaite. Il te faut une dizaine de minutes avant de pouvoir finalement raccrocher la ligne et mettre ton téléphone en mode occupé, mais tu es presque fière de toi lorsque tu arrives au café avec seulement trente minutes de retard. Tu ne mets pas longtemps avant de repérer ton ami, breuvage déjà bien entamé devant lui. Il pourrait te faire la gueule, mais tu lui offres un sourire que tu espères suffit pour excuser ton retard. Tu t’approches du jeune homme, lui fait la bise avant de prendre place devant lui. « Désolée, désolée, désolée. Ça fait une différence si je le dis une fois de plus? » Tu utilises un ton léger, un sourire qui se veut charmant, mais depuis le temps, tu sais qu’il n’est pas surpris. Et puis bon, s’il est encore là, c’est qu’il ne doit pas être si fâché, non? « Je t’offre le repas et la chance de me raconter absolument n’importe quoi pour me faire pardonner. Qu’est-ce que tu en penses? »