and she will be loved
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Un soupir agacé traversait ses lèvres. Il se laissait tomber de tout son poids dans le canapé n'écoutant que vaguement ce que lui disait sa sœur. « Come on, Drew. She needs help, she's all alone. Don't be such a jerk. » Depuis dix bonnes minutes, elle le suppliait -c'est le terme- de venir l'aider pour le déménagement d'une amie. Il est gentil, Drew, il aime rendre service en général, mais l'idée de monter sans arrêt des étages les bras encombrés de cartons ne l'enchantait guère. Encore moins pour une inconnue. A en croire Julia et la façon dont elle parlait d'elle, elle semblait être une bonne amie de sa jumelle, mais ça ne suffisait pas pour le motiver à bouger de son appartement. Ses sourcils se fronçaient et il secouait la tête devant l'air attendri de sa sœur. C'était toujours comme ça. Elle finissait toujours par gagner. Depuis qu'ils étaient hauts comme trois pommes, c'était comme ça. Elle avait toujours su trouver les bons mots pour le faire changer d'avis. L'attrapant par le bras, elle lui jurait qu'ils s'amuseraient et qu'ils ne verraient pas le temps passé. Il serait chez lui ce soir, à l'heure, sans rien de cassé. Rien n'était sûr concernant le dernier point. D'un air nonchalant, il attrapait sa veste et se dirigeait vers la porte. « I hate you. » soufflait-il en arborant un sourire forcé. Elle le poussait dehors en riant doucement.

Les mains enfoncées dans les poches et une moue boudeuse collée sur son visage, il attendait patiemment sur le palier aux côtés de sa sœur. Puis la porte s'ouvrait sur elle. Il la connaissait cette amie de Julia. Malia. Du moins, il l'avait déjà aperçu, une ou deux fois lorsqu'il avait rendu visite à sa sœur à Manchester un an auparavant. Noah le charriait bien trop souvent la concernant pour qu'il l'ait oubliée. Sans trop savoir pourquoi, il se redressait et sortait les mains de ses poches. Il restait silencieux lorsque les deux amies s'enlaçaient, heureuses de se retrouver. Puis c'était son tour. « Andrew. » lâchait-il simplement en tendant sa main vers elle. A vrai dire, il se souvenait très bien d'elle, mais ne savait pas si c'était aussi son cas. Un sourire étirait ses lèvres. Puis elle les laissait entrer dans l'appartement, vide à certains endroits, plein de cartons à d'autres. Rien qu'à cette vue, Andrew était déjà épuisé. Son regard parcourait les murs, les quelques affaires qui débordaient des cartons, tentant même de s'aventurer dans les autres pièces un peu plus loin. Les deux jeunes femmes continuaient de discuter quelques instants. Lui, un peu plus en retrait, se contenter de la regarder. Ils s'étaient croisés à plusieurs reprises, dans un bar, à une soirée, avaient échangé quelques regards mais ne s'étaient jamais parlé. Elle l'intriguait et de ce fait elle l'impressionnait. Son regard enfantin, ses longs cheveux bruns, son rire cristallin. Il avait noté chaque détail, Drew. Il n'avait jamais été un coureur de jupons. Le charme n'était pas au rendez-vous lors de conversations avec les créatures du sexe opposé, il était souvent remplacé par la maladresse et les bégaiements. Alors il n'avait rien tenté, même si l'idée avait effleuré son esprit bien des fois. Il s'était toujours trouvé une excuse ; elle est accompagnée, il est trop tard, il rentre à Londres demain, Noah se foutra de sa gueule s'il se fait rembarrer. Le cul collé à son tabouret, accoudé au bar, il n'avait pas bougé, se contentant de la regarder de loin. Il l'avait regretté par la suite certain de ne jamais la revoir. L'admirer de loin et espérer semblait plus simple que de se lancer dans l'arène aux yeux de Drew. Puis une femme comme elle ne devait certainement pas être seule, il n'avait sûrement aucune chance. Il secouait légèrement la tête de gauche à droite se sentant ridicule d'avoir ces pensées. Ses yeux se posaient sur ses chaussures quelques secondes. Puis relevant la tête, il croisait le regard de Malia. Le téléphone de sa sœur le sauvait en sonnant. Son visage se décomposait quand sa sœur annonçait qu'elle avait une urgence et qu'elle serait de retour pour les aider dans une heure. Il lançait un regard qui en disait long à sa sœur. Hissée sur la pointe des pieds, elle déposait un baiser sur sa joue en jurant qu'elle ferait vite. Il la détestait. Une forte envie de crier le prenait, mais il se retenait en prenant sur lui. Elle l'avait peut-être même fait exprès, cette traitresse. Il n'avait jamais eu envie de venir faire ce déménagement et maintenant il se retrouvait seul avec cette presque inconnue. Noah lui aurait certainement dit que c'était le destin, la chance à saisir. Mais Andrew lui se sentait juste en trop, mal à l'aise.

Le silence devenant trop lourd à supporter, il décidait de briser la glace. « So, you got tired of Manchester ? You'll see, London is way better. Don't listen to Julia, she doesn't know what she's talking about. » Sa main venait gratter sa nuque nerveusement avant qu'il ne quitte sa veste. Il la gardait dans ses mains ne sachant pas trop quoi en faire. La nervosité l'avait figé, il ne savait plus quoi faire. Il se trouvait idiot de réagir de la sorte. Mais maintenant, il se rappelait pourquoi il ne l'avait pas abordé à Manchester. Il était un désastre, un vrai, un foutoir, un maladroit qui pouvait faire rire, mais qui faisait surtout de la peine. Elle, paraissait sûre d'elle, légère, douce dans chacun de ses gestes. Ce côté apaisant la rendait attirante aux yeux d'Andrew. Elle semblait être tout ce qu'il n'était pas, et pourtant tout ce qu'il cherchait. Il sentait son regard sur lui, il se sentait rougir plus qu'il ne le devrait. « What do you want to do first ? » lâchait-il pour se concentrer sur autre chose. Finalement, l'idée de monter et de descendre des cartons ne le rebutait plus autant. Prendre l'air lui ferait du bien.

and she will be loved
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Alors que Julia quittait l'appartement, un certain malaise s'installait. Il se savait plus où se mettre, il irait même jusqu'à prendre un des cartons vides qui trainait pour se le mettre sur la tête. Les femmes l'avaient toujours destabilisé, il n'avait jamais été un Don Juan à l'image de son ami, Harry. Il avait la manière, les mots, la stature. Ca ne ratait jamais, aucune femme ne résistait à Harry. Il n'avait pas cette maladresse maladive, cette timidité excessive qui caractérisait Andrew. Jamais sûr de lui, il cherchait sans cesse ses mots et soutenir le regard d'une femme qui lui plaisait était un défi insurmontable. Il aimerait être cet homme sûr de lui, suscitant une certaine curiosité chez la gente féminine. Mais il était à mille lieues de ça. Sa sœur l'avait clairement abandonné à son sort. Avec elle à ses côtés, rien ne pouvait mal se passer, maintenant qu'il était seul, rien n'était aussi sûr. Elle l'avait certainement fait exprès jouant avec ses nerfs. Ses sourcils se fronçaient lorsque Malia insinuait qu'elle les laissait pour rejoindre un homme. Il ne manquerait plus que ça. Qu'Andrew joue la babysitter avec ses amies pendant que madame prend du bon temps. Il savait qu'il aurait du refuser cette proposition -c'était ce qu'il avait fait d'ailleurs-, mais elle avait tellement insisté, qu'il n'avait pas pu y échapper. Julia finissait souvent -trop souvent- par avoir le dernier mot dans leur relation de jumeaux, il faudrait qu'il y travaille. C'était l'aîné après tout. La porte qui claquait le sortait de ses rêveries. Un léger silence s'installait dans la pièce, seuls les bruits venant de la rue pouvaient se faire entendre si l'on tendait l'oreille. Leurs regards se croisaient le temps d'une seconde, mais Andrew faisait comme si quelque chose avait attiré son attention sur la droite rompant le contact. Il attrapait un bouquin au hasard s'intéressant au résumé. Du coin de l'oeil, il apercevait la jeune femme lui tourner le dos pour ranger des affaires. Sans s'en rendre compte, il finissait par l'observer, le livre dans les mains. Julia lui avait souvent parlé d'elle, avant même qu'il ne l'a rencontre. Les deux femmes semblaient très proches, et à de nombreuses reprises, il s'était senti reconnaissant que sa sœur jumelle rencontre une telle personne, loin de leur chez eux. Quitter Julia pour partir faire ses études avait été une épreuve pour Andrew même s'il était toujours resté silencieux à ce sujet. Alors, savoir qu'elle avait une personne de confiance à ses côtés l'avait rassuré et avait rendu les kilomètres qui les séparaient moins effrayants. Quelqu'un veillait sur elle alors qu'il ne pouvait pas le faire.

Puis il l'avait enfin rencontrée. C'était une sensation étrange d'ailleurs, car à travers les récits de sa sœur, il avait comme l'impression de la connaître, sans jamais lui avoir parler. Ils s'étaient croisés à une soirée dans un bar où sa sœur l'avait trainé avec des amis. Quelques mots échangés, des politesses, rien de plus. Il était effacé, Andrew, il ne parlait pas trop fort et pas souvent à vrai dire, il restait dans un coin à boire son verre, observant les gens en silence. La foule n'était pas son élément, encore moins avec des inconnus. Elle semblait être tout le contraire. Pleine de vie, elle lui avait arraché plusieurs sourires. Il l'avait observée ce soir là. Jamais son sourire n'avait quitté son visage, son rire emplissait la pièce, elle avait cette présence qu'il lui avait fallu une certaine admiration de la part du jeune homme. Deux mondes opposés apparaissant comme incompatibles. Trop extrêmes, trop éloignés pour se comprendre peut-être. Pourtant, elle l'avait attiré, il devait l'avouer. Intriguer aussi peut-être. Elle se retournait. Il se rendait alors compte qu'il l'observait et le livre lui échappait des mains paralysé par la gêne. D'un geste vif, il ramassait le bouquin qu'il remettait dans son carton. Il raclait sa gorge, gêné, avant de briser le silence comme pour se cacher derrière les mots. Un hochement de tête accompagné d'un léger sourire. « You'll love London, for sure. Believe me. » Combien de fois une dispute avait éclatée entre les jumeaux à ce sujet ? Manchester ou Londres ? Il avait arrêté de compter. Cela avait toujours été Londres pour Andrew, et il pouvait passer des heures à débattre pour défendre la ville de son cœur. Apparemment, Manchester était à Malia ce que Brighton était à Andrew. Il baissait les yeux, hésitant. Il aurait aimé lui proposer ses connaissances de la ville et de ses moindres recoins, mais il n'en faisait rien. Trouillard, pensait-il. Il le regretterait sûrement. Le malaise se faisait pesant. Il ne savait pas quoi faire de ses mains, il ne savait pas s'il devait se lancer dans une conversation ou se taire, il était perdu. L'envie de partir s'était envolée, mais l'envie de rester provoquait une contradiction. Tout se mélangeait. Il avait envie de rester avec elle, mais prendre ses jambes à son cou pour fuir cette situation gênante lui apparaissant aussi comme une solution. Tiraillé entre rester et fuir.

Et, finalement, dans un élan de courage, il lui proposait son aide. Ranger de la vaisselle dans le placard. Dit comme ça, ça n'a pas l'air compliqué mais quand on a deux mains gauche comme Andrew, ça peut le devenir. Un haussement d'épaules qu'il aurait voulu plus convaincu. « Alright, but I would like to apologise now for what I will possibly break later, if you don't mind. » Et son regard se posait sur le livre qu'il avait fait tombé un instant auparavant. La maladresse le définissait entièrement. Maladroit avec les mots, les sentiments, les gestes. Rien ne tenait dans ses mains, dans sa vie. Du moins, il le voyait comme ça. Incapable de jongler avec tout ce que les autres semblaient manier avec tant d'aisance. Il l'avait prévenue, il avait tendance à briser ce qu'il tentait de s'approprier. Lâchant son regard, il se dirigeait vers le carton qu'elle lui avait pointé du doigt quelques secondes auparavant. Il sortait des assiettes qu'il rangeait le plus soigneusement possible dans le placard juste derrière lui. Puis il s'arrêtait quelques secondes, elle lui faisait dos. Il grattait sa nuque nerveusement avant de prendre la parole. « Oh and if you want to visit London, one day, you can call me. I-I mean you can ask Julia to call me because obviously you don't have my number. » Il toussotait. Il ne s'arrêtait plus de parler lorsqu'il se trouvait dans une situation déstabilisante, ses pensées s'emmêlaient encore et encore, à l'en faire bégayer. Ramer plus que ça ne pouvait certainement pas être possible. Bordel, elle le regardait maintenant. « Hum, maybe you already know London, it's stupid, sorry. Forget what I just said. » Et il replongeait la tête dans le carton sans même attendre une réaction de sa part. Malia ne devait pas s'attendre à un tel manchot. Il ne pardonnerait jamais Julia pour tout ça.